ITER : le pari de la Fusion nucléaire.
Quelle est donc la nature de ce projet ? L'aventure ITER commence en 2006 à l'initiative des Etats-Unis, de l'Union Européenne, de la Corée, de la Chine, de l'Inde et du Japon qui se lancent alors dans le pari de la fusion nucléaire. La Russie rejoindra elle aussi le projet l'année suivante.
L'enjeu: reproduire l'énergie du soleil sur terre et faire de la fusion nucléaire une source d'énergie abordable à disposition de l'humanité. Ces partenaires se lancent alors dans la construction d'un réacteur nucléaire expérimental, basé sur le concept du "tokamak" afin de démontrer la faisabilité de la fusion comme énergie d'approvisionnement à grande échelle. Les premiers tokamas datent de 1960 et sont des chambres de confinement magnétique qui visent à contrôler le plasma nécessaire à la production d’énergie par fusion nucléaire. L’objectif est ici de produire de l’électricité par récupération de la chaleur produite par la réaction de fusion nucléaire pour « fournir au monde dans la deuxième moitié du XXIè siècle une énergie ne dégageant pas de CO2, ne laissant pas de déchet radioactif de vie longue et ne présentant pas de risque d'emballement du réacteur. » (1)
Ce projet mobilise ainsi une large communauté scientifique et représente un chantier unique au monde de par sa dimension internationale, son financement et son organisation. C’est en effet l’aboutissement de quarante années de recherches scientifiques conduites simultanément dans le monde entier. Localisé à proximité du site de Cadarache en France, ce chantier expérimental est encadré par l’Agence Iter France et la mission d’accompagnement Iter.
Où en est ce « chantier de la démesure » aujourd’hui?
L’année dernière, une étape fondamentale a été franchie avec la réalisation de la dalle de béton prévue pour supporter l’ensemble de l’édifice et accueillir le plus grand Tokamak au monde. « Cette dalle antisismique de 80 mètres sur 150, d'une épaisseur d'1.50 mètre supportera un bâtiment de 360 000 tonnes de béton. C'est à l'intérieur de ce bâtiment de 80 mètres de haut que viendra le futur réacteur expérimental. » (2)
Bien que cette étape soit un point positif témoignant que le chantier progresse, celui-ci accumule cependant un retard important sur le planning prévisionnel établi en 2007. Sa capacité à tenir les délais fixés au commencement des travaux remet en cause sa faisabilité et sa légitimité compte tenu du poids économique toujours plus lourd du projet. Si pendant longtemps la date de finition annoncée restait l’année 2020, plus personne ne semble y croire ! Une belle promesse de plus en plus perçue comme un projet démesuré. Car plus le retard s’accumule, plus son cout augmente de façon exorbitante. Ainsi, son budget qui s’élevait initialement à 5 milliards de dollars, a déjà était revu largement à la hausse et serait aujourd’hui évalué à 13 milliards. Ceci est un des arguments phares avancé par les détracteurs de ce projet.
Une autre critique découle de la contradiction entre ce projet et les voix de plus en plus nombreuses qui revendiquent une nécessaire sortie du nucléaire. Ce projet couterait des sommes astronomiques pour reproduire un temps la fusion nucléaire qui fait briller le soleil… De nombreux physiciens voient ainsi en ITER l’échec annoncé d’un projet bien trop gourmand financièrement puisqu’il accapare plus de 60% des fonds européens de recherche sur l’énergie. (3) On peut cependant se demander si ces détracteurs ne pêchent pas par excès d’amalgame car rappelons-le, ce réacteur expérimental n’est pas une centrale ! Le but est ici de créer une énergie inépuisable et abordable qui ne serait pas produite à partir d’énergies fossiles ou de matériaux rares. Cette distinction semble nécessaire car ce réacteur ne comporte pas de risques d’emballement. S’il venait à dysfonctionner, il y aurait certes des risques, mais ces risques seraient bien moindres que ceux liés à l’exploitation de l’énergie nucléaire… Cette critique est donc à nuancer. Serait-ce la peur du mot « nucléaire » qui flouterait finalement les esprits quant à la nature de ce projet ?
Si l’on sait désormais que la date de livraison ne sera pas 2020, il faudra attendre le mois de Novembre pour de savoir à combien s’élève le cumul du retard. Cet été, celui-ci était déjà estimé à 3 ans…(4) Ce projet finira t’il par aboutir ?
La promesse de la fusion : un rêve ou une réalité ?
C’est donc un projet qui s’éternise… La belle promesse de la fusion nucléaire serait-elle finalement plus utopiste que réaliste ?
L’ancien patron du CEA : le français Bernard Bigot a récemment succédé au physicien japonais Osamu Motojima. Désormais à la tête du projet, ce dernier compte bien redynamiser ce chantier et ré-ancrer sa légitimité dans l’imaginaire collectif. Il déclare ainsi qu’« Aujourd'hui, il y a une vraie prise de conscience de tous les partenaires qu'il faut ajouter une dimension managériale forte au projet ». Il estime qu’en plus de la période d’apprentissage incontournable, le projet est également ralenti par son organisation. Le nouveau directeur pilote du projet compte demander un fond de réserve qui lui permettrait de parer les aléas du chantier. Il reste cependant réaliste et annonce qu’en effet, escompter obtenir un premier plasma d’ici 2019 n’est "clairement pas faisable". Bien que Bernard Bigot projette de proposer un nouveau calendrier prévisionnel, il reste persuadé qu’ « en dépit des difficultés rencontrées, l'espoir est encore total que la fusion mérite cet investissement ». (5)
Il est dans l’intérêt des partenaires du projet de tout faire pour relancer ce dernier car il est clair, comme le confie Bernard Bigot, « que si nous ne savons pas correctement gérer ce projet, si les engagements pris ne sont pas tenus », celui-ci pourrait finir par réellement « être en danger »… Il reste donc à savoir si la nouvelle direction de Bernard Bigot redonnera un nouveau souffle à la promesse ITER… (5)
Il faut aussi garder à l’esprit que ce projet est financé par de nombreux états étrangers mais que le pays d’accueil est la France. Ainsi, si le projet ITER est mené à termes avec succès, cela sera une réelle aubaine pour le pays puisque cette importante innovation scientifique sera implantée sur le sol français. Bien que des critiques aient pu subvenir, parvenir à la fusion nucléaire constituerait malgré tout un véritable tournant scientifique comme historique dans l’histoire de l’humanité. Si beaucoup d’incertitudes continuent d’entourer ce projet, une seule chose est certaine, c’est que le mot d’ordre du projet ITER reste la patience…
Quelle est donc la nature de ce projet ? L'aventure ITER commence en 2006 à l'initiative des Etats-Unis, de l'Union Européenne, de la Corée, de la Chine, de l'Inde et du Japon qui se lancent alors dans le pari de la fusion nucléaire. La Russie rejoindra elle aussi le projet l'année suivante.
L'enjeu: reproduire l'énergie du soleil sur terre et faire de la fusion nucléaire une source d'énergie abordable à disposition de l'humanité. Ces partenaires se lancent alors dans la construction d'un réacteur nucléaire expérimental, basé sur le concept du "tokamak" afin de démontrer la faisabilité de la fusion comme énergie d'approvisionnement à grande échelle. Les premiers tokamas datent de 1960 et sont des chambres de confinement magnétique qui visent à contrôler le plasma nécessaire à la production d’énergie par fusion nucléaire. L’objectif est ici de produire de l’électricité par récupération de la chaleur produite par la réaction de fusion nucléaire pour « fournir au monde dans la deuxième moitié du XXIè siècle une énergie ne dégageant pas de CO2, ne laissant pas de déchet radioactif de vie longue et ne présentant pas de risque d'emballement du réacteur. » (1)
Ce projet mobilise ainsi une large communauté scientifique et représente un chantier unique au monde de par sa dimension internationale, son financement et son organisation. C’est en effet l’aboutissement de quarante années de recherches scientifiques conduites simultanément dans le monde entier. Localisé à proximité du site de Cadarache en France, ce chantier expérimental est encadré par l’Agence Iter France et la mission d’accompagnement Iter.
Où en est ce « chantier de la démesure » aujourd’hui?
L’année dernière, une étape fondamentale a été franchie avec la réalisation de la dalle de béton prévue pour supporter l’ensemble de l’édifice et accueillir le plus grand Tokamak au monde. « Cette dalle antisismique de 80 mètres sur 150, d'une épaisseur d'1.50 mètre supportera un bâtiment de 360 000 tonnes de béton. C'est à l'intérieur de ce bâtiment de 80 mètres de haut que viendra le futur réacteur expérimental. » (2)
Bien que cette étape soit un point positif témoignant que le chantier progresse, celui-ci accumule cependant un retard important sur le planning prévisionnel établi en 2007. Sa capacité à tenir les délais fixés au commencement des travaux remet en cause sa faisabilité et sa légitimité compte tenu du poids économique toujours plus lourd du projet. Si pendant longtemps la date de finition annoncée restait l’année 2020, plus personne ne semble y croire ! Une belle promesse de plus en plus perçue comme un projet démesuré. Car plus le retard s’accumule, plus son cout augmente de façon exorbitante. Ainsi, son budget qui s’élevait initialement à 5 milliards de dollars, a déjà était revu largement à la hausse et serait aujourd’hui évalué à 13 milliards. Ceci est un des arguments phares avancé par les détracteurs de ce projet.
Une autre critique découle de la contradiction entre ce projet et les voix de plus en plus nombreuses qui revendiquent une nécessaire sortie du nucléaire. Ce projet couterait des sommes astronomiques pour reproduire un temps la fusion nucléaire qui fait briller le soleil… De nombreux physiciens voient ainsi en ITER l’échec annoncé d’un projet bien trop gourmand financièrement puisqu’il accapare plus de 60% des fonds européens de recherche sur l’énergie. (3) On peut cependant se demander si ces détracteurs ne pêchent pas par excès d’amalgame car rappelons-le, ce réacteur expérimental n’est pas une centrale ! Le but est ici de créer une énergie inépuisable et abordable qui ne serait pas produite à partir d’énergies fossiles ou de matériaux rares. Cette distinction semble nécessaire car ce réacteur ne comporte pas de risques d’emballement. S’il venait à dysfonctionner, il y aurait certes des risques, mais ces risques seraient bien moindres que ceux liés à l’exploitation de l’énergie nucléaire… Cette critique est donc à nuancer. Serait-ce la peur du mot « nucléaire » qui flouterait finalement les esprits quant à la nature de ce projet ?
Si l’on sait désormais que la date de livraison ne sera pas 2020, il faudra attendre le mois de Novembre pour de savoir à combien s’élève le cumul du retard. Cet été, celui-ci était déjà estimé à 3 ans…(4) Ce projet finira t’il par aboutir ?
La promesse de la fusion : un rêve ou une réalité ?
C’est donc un projet qui s’éternise… La belle promesse de la fusion nucléaire serait-elle finalement plus utopiste que réaliste ?
L’ancien patron du CEA : le français Bernard Bigot a récemment succédé au physicien japonais Osamu Motojima. Désormais à la tête du projet, ce dernier compte bien redynamiser ce chantier et ré-ancrer sa légitimité dans l’imaginaire collectif. Il déclare ainsi qu’« Aujourd'hui, il y a une vraie prise de conscience de tous les partenaires qu'il faut ajouter une dimension managériale forte au projet ». Il estime qu’en plus de la période d’apprentissage incontournable, le projet est également ralenti par son organisation. Le nouveau directeur pilote du projet compte demander un fond de réserve qui lui permettrait de parer les aléas du chantier. Il reste cependant réaliste et annonce qu’en effet, escompter obtenir un premier plasma d’ici 2019 n’est "clairement pas faisable". Bien que Bernard Bigot projette de proposer un nouveau calendrier prévisionnel, il reste persuadé qu’ « en dépit des difficultés rencontrées, l'espoir est encore total que la fusion mérite cet investissement ». (5)
Il est dans l’intérêt des partenaires du projet de tout faire pour relancer ce dernier car il est clair, comme le confie Bernard Bigot, « que si nous ne savons pas correctement gérer ce projet, si les engagements pris ne sont pas tenus », celui-ci pourrait finir par réellement « être en danger »… Il reste donc à savoir si la nouvelle direction de Bernard Bigot redonnera un nouveau souffle à la promesse ITER… (5)
Il faut aussi garder à l’esprit que ce projet est financé par de nombreux états étrangers mais que le pays d’accueil est la France. Ainsi, si le projet ITER est mené à termes avec succès, cela sera une réelle aubaine pour le pays puisque cette importante innovation scientifique sera implantée sur le sol français. Bien que des critiques aient pu subvenir, parvenir à la fusion nucléaire constituerait malgré tout un véritable tournant scientifique comme historique dans l’histoire de l’humanité. Si beaucoup d’incertitudes continuent d’entourer ce projet, une seule chose est certaine, c’est que le mot d’ordre du projet ITER reste la patience…
- http://www.sciencesetavenir.fr/sciences/20150520.AFP8181/dote-d-un-nouveau-patron-iter-reprend-de-la-vigueur.html
- http://www.franceinfo.fr/emission/ils-ont-fait-l-actu/2014-2015/que-devient-le-projet-iter-23-09-2014-06-23
- http://www.sortirdunucleaire.org/ere12
- http://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/20150609.OBS0404/iter-le-chantier-de-la-demesure-prend-du-retard.html
- http://www.sciencesetavenir.fr/sciences/20150520.AFP8181/dote-d-un-nouveau-patron-iter-reprend-de-la-vigueur.html