Entretien avec François Delahaye publié dans la Revue des affaires n°6
Comment l'hôtellerie de luxe et le Plaza Athénée se sont-ils portés dans le contexte post-crise ?
Au moment de la crise des Subprimes, l'hôtellerie française dans son ensemble a subi le contre-coup de l'activité mondiale. Les palaces, au même titre que les autres segments de l'offre hôtelière sont sensibles aux variations de conjoncture. Au Plaza Athénée, la baisse de fréquentation fut marquée au cours de l'année 2009. Certains membres des grandes sociétés de la sphère financière comme Merryl Linch, Goldman Sachs, Morgan Stanley, faisant partie de notre clientèle régulière, la part des clients américains, la plus importante, a significativement baissé. La période difficile a duré un an, sans empêcher le Plaza Athénée de poursuivre sa stratégie et de progresser. En 2010, la croissance de notre chiffre d'affaire a atteint 10% pour se situer aux environs de 80 millions d'euros. L'argent ne faisant que changer de main, nous avons réussi à traverser la crise sans dégâts majeurs. En revanche, le climat lié aux attentats qui on touché Paris en 2015 risque de porter un coup beaucoup plus sérieux à notre activité. Après le 11 septembre, les hôtels de luxe à New-York ont mis deux ans avant de retrouver leurs taux d'occupation. Si les pouvoirs publics en France s’entêtent à maintenir l'état d'urgence, Paris pourrait bien connaître le même sort. En plus de perpétuer un climat psychologique délétère, l'état d'urgence a un impact direct puisqu’il rend inopérant les assurances tourisme.
La concurrence entre grands palaces a-t-elle évolué ces dernières années ?
Le marché de l'hôtellerie de luxe a connu deux grandes transformations notoires ces dix dernières années. Tout d'abord, il y a eu la concurrence renouvelée des hôtels de luxe parisiens due à la pluie d'investissements qui a arrosé la capitale. Ces investissements se sont traduits par l'ouverture de nouvelles enseignes de luxe et par la rénovation du patrimoine existant. Attirés par un taux d'occupation des hôtels parisiens supérieur à la moyenne, les investissements venus d'Asie se sont succédés comme le prouvent les ouvertures du Mandarin Oriental ou du Shangri-La. Cet afflux de capitaux est sain puisqu'il permet à Paris de proposer une offre aussi compétitive que Londres ou Barcelone en nivelant la qualité des prestations par le haut. A l'instar des rénovations du Ritz, du Meurice, et évidemment du Plaza Athénée, notre exceptionnel patrimoine méritait d'être modernisé. La deuxième transformation est liée à l'économie participative et à l'émergence de plateformes comme Airbnb. Ce type de formule nous affecte. Très concrètement, certains appartements de l'avenue Montaigne sont loués pour de courts séjours à d'anciens clients du Plaza Athénée. Loin de me positionner contre les opportunités que représente l'économie digitale, les plateformes communautaires de location doivent être soumises aux mêmes taxes de séjours que les hôteliers. Sinon, nous risquerons l'asphyxie.
Vous avez milité pour la création d'un Label Palace en 2010. Pourquoi est-il important de distinguer les palaces des autres hôtels cinq étoiles ?
L'idée de créer un label palace est arrivée dans un second temps. L'enjeu fut avant tout d'amener la France à adopter l'échelle de classification hôtelière internationale. Nous étions en effet le seul pays à n'avoir que quatre étoiles luxe comme summum de classification. Après avoir obtenu l'approbation du ministère du Tourisme, nous nous sommes donc lancés avec Pierre Ferchaut, l'ancien directeur de l'Hôtel Bristol, dans l'élaboration de nouveaux critères classant allant de quatre à cinq étoiles. Une fois les nouveaux standards entrés en vigueur en 2010, les hôtels franchisés de grand standing ont immédiatement revendiqué le statut cinq étoiles. Il s'agissait là d'une anomalie car si les prestations de ces établissements sont assurément luxueuses, elles ne correspondent pas au niveau d’offre proposé par les grandes maisons hôtelières comme le Plaza Athénée. Il a donc fallu mettre au point un nouvel échelon susceptible de répondre à des critères d'une exigence implacable. C'est de cette façon qu'est né le label Palace.
Le Plaza Athénée a su répondre aux critères d'excellence requis. Sur quels axes les différentes étapes d’amélioration de son offre ont-t-elles porté ?
A la fin des années 1990, quand je suis arrivé à la tête du Plaza Athénée, l'hôtel n'était pas propriétaire de ses murs, son image était vieillissante et son dynamisme ralentissait. Il était impératif de redonner à cet établissement une stratégie s'inscrivant dans la continuité du mythe historique qu'il incarne. A l'époque où cette ambition est née au début des années 2000, le Brunei Investment Agency devenait, par l'intermédiaire de son groupe hôtelier Dorchester Collection, le propriétaire du Plaza Athénée. Les nouveaux maîtres des lieux ont immédiatement compris l'importance d'investir à long-terme pour innover et faire de cette maison historique une adresse "haute-couture". Un apport de capitaux conséquent (ndrl: estimé à 200 millions d'euros) a ainsi permis à l'hôtel de s'agrandir grâce à l'acquisition de trois immeubles contigus portant la superficie totale de l'hôtel à plus de 25 000 mètres carrés. De nombreuses suites ont été agrandies, modernisées ou créées, et trois salons privés dans un style salle de bal "second empire" ont également vu le jour. En parallèle de cet agrandissement, les espaces historiques du Plaza ont pu être repensés. La galerie et son bar à cocktails qui sont d'incontournables lieux de vie du Paris mondain ont vu leur fonction magnifiée. Enfin et pour finir par le plus remarquable, le concept du restaurant gastronomique d'Alain Ducasse a pu être complètement réinventé sur le thème de la naturalité. Tout l'enjeu de ces diverses modernisations fut de donner un souffle nouveau à l'âme du Plaza Athénée sans la dénaturer.
Comment votre clientèle étrangère a-t-elle évolué ces dernières années ?
Notre clientèle se diversifie et la crise économique mondiale n'a fait que renforcer cette tendance qui date du milieu des années 2000. L'évolution de la répartition de la richesse dans le monde offre la possibilité à une nouvelle catégorie d'individus de vivre l'expérience du palace. À notre clientèle anglo-saxonne traditionnelle qui reste la plus importante proportionnellement, s'est ajoutée une clientèle venue des régions émergentes d'Asie, du Moyen-Orient mais également d'Amérique latine. Fait intéressant, parmi la clientèle asiatique, la proportion de chinois croît beaucoup plus modestement que le laisserait supposer le poids démographique et financier grandissant de la Chine. En fait, ce constat s'explique par la manière de voyager des touristes chinois. Ces derniers ne recherchent pas encore à transformer leurs représentations idéalisées de Paris en instants vécus. Or, venir au Plaza Athénée, c'est chercher à vivre dans un lieu qui incarne l'aura mystérieuse de Paris. Sur ce point, la découverte des vins français est un vecteur très efficace qui amène les touristes étrangers à vouloir progressivement substituer l'expérience de la culture française à l'idée qu'ils s'en font. Notre cave de 30 000 vins ne pourra que les ravir.
Pouvez-vous développer sur la question des attentes de vos clients ? Que recherchent-ils en séjournant au Plaza Athénée ?
Il existe parmi les attentes individuelles de chacun de nos clients un dénominateur commun. Quand vous poussez la porte du Plaza Athénée, vous vous attendez à vivre une expérience magique qui correspond à votre conception idéalisée de Paris. Que ce soit par son architecture, à travers sa culture ou son art de vivre, Paris est une ville qui exalte l'imaginaire d'une vie galante et mondaine. Un mode d'existence qui donne la priorité à la satisfaction des désirs et à la reconnaissance sociale. Le Plaza Athénée est une incarnation de ce mythe. Il est source de distinction, de mystère et d'impossible réalisé. Nos clients cherchent par le rêve et la satisfaction du moindre de leur désir à témoigner de leur importance. A l'occasion de l'anniversaire de sa fille, un client m'a demandé de faire venir deux lionceaux à l'hôtel. Vœu a priori insensé, les fauves finirent pourtant par accueillir la demoiselle à son entrée dans le Plaza Athénée. Vouloir rompre avec cet héritage symbolique de la démesure serait une erreur. A l'instar des mille roses rouges que Jean Gabin fit placer à la fenêtre de l'une de nos suites en témoignage de son amour pour Marlène Dietrich, la réalisation des rêves les plus fous, c'est l'essence historique de notre établissement. Venir y séjourner, c'est vouloir participer à l'écriture de ce récit.
Quels types d'innovations offrez-vous pour combler ces exigences et répondre à ces attentes ?
Innover est la condition de notre pérennité. Cela donne à chaque séjour au Plaza Athnée une saveur unique. Aussi, au delà des multiples services haut de gamme que nous proposons, de la haute-gastronomie au spa Dior en passant par notre bar à cocktails, nous tachons de toujours introduire de la nouveauté. Satisfaire le moindre désir de notre clientèle requiert un personnel conséquent, qualifié, ouvert aux champs des possibles et proche de celle-ci. Il faut pouvoir répondre avec excellence à toute heure du jour ou de la nuit. Il n'est pas rare qu'un client arrive à l'hôtel à quatre heures du matin accompagné de quarante convives qui sont invités à dîner. Nous employons une centaine de cuisiniers pour faire face à ce genre de situation inopinée. Nous perpétuons également un esprit familial qui permet à chacun de proposer des solutions afin d'améliorer ou de moderniser l'offre existante. L'idée d'installer une patinoire hivernale dans la cour-jardin intérieure fut par exemple émise par l'une de nos employées de chambre. Cette patinoire, désormais ouverte tous les hivers émerveille toutes les générations et participe de la magie de Noël.
Votre positionnement de marque repose sur l'alliance entre tradition et modernité. Comment réussissez-vous à faire cohabiter les registres ?
Le Plaza Athénée est comme une vielle dame qui chercherait à inventer les nouvelles technologies de demain. Cette dernière devrait-elle pour autant se passer de sa montre ? L'idée qu'il ‘y a derrière ma conception est simple : l'héritage symbolique de l'histoire a une valeur considérable qu'il faut savoir faire fructifier. La fidélité au récit qui a fait de ce lieu un mythe n'est pas synonyme d'immobilisme, elle est au contraire un socle qui nous encourage à rester à la pointe de la modernité. Nos offres et nos choix esthétiques sont imités dans les hôtels du monde entier, cela prouve bien qu'il n'est pas impossible d'innover en respectant les codes. Prenez le millefeuille par exemple. C’est une pâtisserie typique et indispensable sur une carte des desserts. D'aucun admettra qu'il est très difficile de la déguster sans l'émietter. Tout en conservant sa recette traditionnelle, nos pâtissiers ont eu l'idée de la positionner sur la tranche pour en faciliter la découpe et donc la dégustation. Voilà un exemple concret de ce qu'il est possible de créer avec les recettes que l'on hérite de l'histoire. Au Plaza Athénée, nous sommes entièrement dévoués à cette logique. Voilà ce qui explique notre devise, "il était une fois le palace de demain".
Comment la France peut-elle conserver sa place de leader mondial du tourisme ?
En 2012, lors d'une conférence à Orlando, le Président Barack Obama s'est fixé pour objectif de faire des Etats-Unis la première destination touristique mondiale au dépend de la France. Il est étonnant que les hommes politiques et les journalistes français n'aient pas fait front uni en énumérant les atouts qui nous permettront de conserver notre place. Partant du principe que le tourisme est un acquis, peu de décideurs le considèrent à sa juste valeur. Nous pourrions pourtant faire mieux que ce soit sur la question de l'accueil, de l'anglais ou de la communication politique. Nous avons un pays extraordinaire qui réunit tous les ingrédients du rêve. Doté de paysages aussi divers qu'harmonieux et d'une histoire qui recèle tous les ingrédients du mythe. La conservation de cette place dépend surtout de notre volonté et de notre capacité à communiquer. Il est impératif d'alimenter notre rayonnement, ce que les américains appelleraient le soft power. Atout France réalise de nombreux efforts dans ce sens mais c'est une stratégie politique et touristique globale qu'il nous faut.
Comment l'hôtellerie de luxe et le Plaza Athénée se sont-ils portés dans le contexte post-crise ?
Au moment de la crise des Subprimes, l'hôtellerie française dans son ensemble a subi le contre-coup de l'activité mondiale. Les palaces, au même titre que les autres segments de l'offre hôtelière sont sensibles aux variations de conjoncture. Au Plaza Athénée, la baisse de fréquentation fut marquée au cours de l'année 2009. Certains membres des grandes sociétés de la sphère financière comme Merryl Linch, Goldman Sachs, Morgan Stanley, faisant partie de notre clientèle régulière, la part des clients américains, la plus importante, a significativement baissé. La période difficile a duré un an, sans empêcher le Plaza Athénée de poursuivre sa stratégie et de progresser. En 2010, la croissance de notre chiffre d'affaire a atteint 10% pour se situer aux environs de 80 millions d'euros. L'argent ne faisant que changer de main, nous avons réussi à traverser la crise sans dégâts majeurs. En revanche, le climat lié aux attentats qui on touché Paris en 2015 risque de porter un coup beaucoup plus sérieux à notre activité. Après le 11 septembre, les hôtels de luxe à New-York ont mis deux ans avant de retrouver leurs taux d'occupation. Si les pouvoirs publics en France s’entêtent à maintenir l'état d'urgence, Paris pourrait bien connaître le même sort. En plus de perpétuer un climat psychologique délétère, l'état d'urgence a un impact direct puisqu’il rend inopérant les assurances tourisme.
La concurrence entre grands palaces a-t-elle évolué ces dernières années ?
Le marché de l'hôtellerie de luxe a connu deux grandes transformations notoires ces dix dernières années. Tout d'abord, il y a eu la concurrence renouvelée des hôtels de luxe parisiens due à la pluie d'investissements qui a arrosé la capitale. Ces investissements se sont traduits par l'ouverture de nouvelles enseignes de luxe et par la rénovation du patrimoine existant. Attirés par un taux d'occupation des hôtels parisiens supérieur à la moyenne, les investissements venus d'Asie se sont succédés comme le prouvent les ouvertures du Mandarin Oriental ou du Shangri-La. Cet afflux de capitaux est sain puisqu'il permet à Paris de proposer une offre aussi compétitive que Londres ou Barcelone en nivelant la qualité des prestations par le haut. A l'instar des rénovations du Ritz, du Meurice, et évidemment du Plaza Athénée, notre exceptionnel patrimoine méritait d'être modernisé. La deuxième transformation est liée à l'économie participative et à l'émergence de plateformes comme Airbnb. Ce type de formule nous affecte. Très concrètement, certains appartements de l'avenue Montaigne sont loués pour de courts séjours à d'anciens clients du Plaza Athénée. Loin de me positionner contre les opportunités que représente l'économie digitale, les plateformes communautaires de location doivent être soumises aux mêmes taxes de séjours que les hôteliers. Sinon, nous risquerons l'asphyxie.
Vous avez milité pour la création d'un Label Palace en 2010. Pourquoi est-il important de distinguer les palaces des autres hôtels cinq étoiles ?
L'idée de créer un label palace est arrivée dans un second temps. L'enjeu fut avant tout d'amener la France à adopter l'échelle de classification hôtelière internationale. Nous étions en effet le seul pays à n'avoir que quatre étoiles luxe comme summum de classification. Après avoir obtenu l'approbation du ministère du Tourisme, nous nous sommes donc lancés avec Pierre Ferchaut, l'ancien directeur de l'Hôtel Bristol, dans l'élaboration de nouveaux critères classant allant de quatre à cinq étoiles. Une fois les nouveaux standards entrés en vigueur en 2010, les hôtels franchisés de grand standing ont immédiatement revendiqué le statut cinq étoiles. Il s'agissait là d'une anomalie car si les prestations de ces établissements sont assurément luxueuses, elles ne correspondent pas au niveau d’offre proposé par les grandes maisons hôtelières comme le Plaza Athénée. Il a donc fallu mettre au point un nouvel échelon susceptible de répondre à des critères d'une exigence implacable. C'est de cette façon qu'est né le label Palace.
Le Plaza Athénée a su répondre aux critères d'excellence requis. Sur quels axes les différentes étapes d’amélioration de son offre ont-t-elles porté ?
A la fin des années 1990, quand je suis arrivé à la tête du Plaza Athénée, l'hôtel n'était pas propriétaire de ses murs, son image était vieillissante et son dynamisme ralentissait. Il était impératif de redonner à cet établissement une stratégie s'inscrivant dans la continuité du mythe historique qu'il incarne. A l'époque où cette ambition est née au début des années 2000, le Brunei Investment Agency devenait, par l'intermédiaire de son groupe hôtelier Dorchester Collection, le propriétaire du Plaza Athénée. Les nouveaux maîtres des lieux ont immédiatement compris l'importance d'investir à long-terme pour innover et faire de cette maison historique une adresse "haute-couture". Un apport de capitaux conséquent (ndrl: estimé à 200 millions d'euros) a ainsi permis à l'hôtel de s'agrandir grâce à l'acquisition de trois immeubles contigus portant la superficie totale de l'hôtel à plus de 25 000 mètres carrés. De nombreuses suites ont été agrandies, modernisées ou créées, et trois salons privés dans un style salle de bal "second empire" ont également vu le jour. En parallèle de cet agrandissement, les espaces historiques du Plaza ont pu être repensés. La galerie et son bar à cocktails qui sont d'incontournables lieux de vie du Paris mondain ont vu leur fonction magnifiée. Enfin et pour finir par le plus remarquable, le concept du restaurant gastronomique d'Alain Ducasse a pu être complètement réinventé sur le thème de la naturalité. Tout l'enjeu de ces diverses modernisations fut de donner un souffle nouveau à l'âme du Plaza Athénée sans la dénaturer.
Comment votre clientèle étrangère a-t-elle évolué ces dernières années ?
Notre clientèle se diversifie et la crise économique mondiale n'a fait que renforcer cette tendance qui date du milieu des années 2000. L'évolution de la répartition de la richesse dans le monde offre la possibilité à une nouvelle catégorie d'individus de vivre l'expérience du palace. À notre clientèle anglo-saxonne traditionnelle qui reste la plus importante proportionnellement, s'est ajoutée une clientèle venue des régions émergentes d'Asie, du Moyen-Orient mais également d'Amérique latine. Fait intéressant, parmi la clientèle asiatique, la proportion de chinois croît beaucoup plus modestement que le laisserait supposer le poids démographique et financier grandissant de la Chine. En fait, ce constat s'explique par la manière de voyager des touristes chinois. Ces derniers ne recherchent pas encore à transformer leurs représentations idéalisées de Paris en instants vécus. Or, venir au Plaza Athénée, c'est chercher à vivre dans un lieu qui incarne l'aura mystérieuse de Paris. Sur ce point, la découverte des vins français est un vecteur très efficace qui amène les touristes étrangers à vouloir progressivement substituer l'expérience de la culture française à l'idée qu'ils s'en font. Notre cave de 30 000 vins ne pourra que les ravir.
Pouvez-vous développer sur la question des attentes de vos clients ? Que recherchent-ils en séjournant au Plaza Athénée ?
Il existe parmi les attentes individuelles de chacun de nos clients un dénominateur commun. Quand vous poussez la porte du Plaza Athénée, vous vous attendez à vivre une expérience magique qui correspond à votre conception idéalisée de Paris. Que ce soit par son architecture, à travers sa culture ou son art de vivre, Paris est une ville qui exalte l'imaginaire d'une vie galante et mondaine. Un mode d'existence qui donne la priorité à la satisfaction des désirs et à la reconnaissance sociale. Le Plaza Athénée est une incarnation de ce mythe. Il est source de distinction, de mystère et d'impossible réalisé. Nos clients cherchent par le rêve et la satisfaction du moindre de leur désir à témoigner de leur importance. A l'occasion de l'anniversaire de sa fille, un client m'a demandé de faire venir deux lionceaux à l'hôtel. Vœu a priori insensé, les fauves finirent pourtant par accueillir la demoiselle à son entrée dans le Plaza Athénée. Vouloir rompre avec cet héritage symbolique de la démesure serait une erreur. A l'instar des mille roses rouges que Jean Gabin fit placer à la fenêtre de l'une de nos suites en témoignage de son amour pour Marlène Dietrich, la réalisation des rêves les plus fous, c'est l'essence historique de notre établissement. Venir y séjourner, c'est vouloir participer à l'écriture de ce récit.
Quels types d'innovations offrez-vous pour combler ces exigences et répondre à ces attentes ?
Innover est la condition de notre pérennité. Cela donne à chaque séjour au Plaza Athnée une saveur unique. Aussi, au delà des multiples services haut de gamme que nous proposons, de la haute-gastronomie au spa Dior en passant par notre bar à cocktails, nous tachons de toujours introduire de la nouveauté. Satisfaire le moindre désir de notre clientèle requiert un personnel conséquent, qualifié, ouvert aux champs des possibles et proche de celle-ci. Il faut pouvoir répondre avec excellence à toute heure du jour ou de la nuit. Il n'est pas rare qu'un client arrive à l'hôtel à quatre heures du matin accompagné de quarante convives qui sont invités à dîner. Nous employons une centaine de cuisiniers pour faire face à ce genre de situation inopinée. Nous perpétuons également un esprit familial qui permet à chacun de proposer des solutions afin d'améliorer ou de moderniser l'offre existante. L'idée d'installer une patinoire hivernale dans la cour-jardin intérieure fut par exemple émise par l'une de nos employées de chambre. Cette patinoire, désormais ouverte tous les hivers émerveille toutes les générations et participe de la magie de Noël.
Votre positionnement de marque repose sur l'alliance entre tradition et modernité. Comment réussissez-vous à faire cohabiter les registres ?
Le Plaza Athénée est comme une vielle dame qui chercherait à inventer les nouvelles technologies de demain. Cette dernière devrait-elle pour autant se passer de sa montre ? L'idée qu'il ‘y a derrière ma conception est simple : l'héritage symbolique de l'histoire a une valeur considérable qu'il faut savoir faire fructifier. La fidélité au récit qui a fait de ce lieu un mythe n'est pas synonyme d'immobilisme, elle est au contraire un socle qui nous encourage à rester à la pointe de la modernité. Nos offres et nos choix esthétiques sont imités dans les hôtels du monde entier, cela prouve bien qu'il n'est pas impossible d'innover en respectant les codes. Prenez le millefeuille par exemple. C’est une pâtisserie typique et indispensable sur une carte des desserts. D'aucun admettra qu'il est très difficile de la déguster sans l'émietter. Tout en conservant sa recette traditionnelle, nos pâtissiers ont eu l'idée de la positionner sur la tranche pour en faciliter la découpe et donc la dégustation. Voilà un exemple concret de ce qu'il est possible de créer avec les recettes que l'on hérite de l'histoire. Au Plaza Athénée, nous sommes entièrement dévoués à cette logique. Voilà ce qui explique notre devise, "il était une fois le palace de demain".
Comment la France peut-elle conserver sa place de leader mondial du tourisme ?
En 2012, lors d'une conférence à Orlando, le Président Barack Obama s'est fixé pour objectif de faire des Etats-Unis la première destination touristique mondiale au dépend de la France. Il est étonnant que les hommes politiques et les journalistes français n'aient pas fait front uni en énumérant les atouts qui nous permettront de conserver notre place. Partant du principe que le tourisme est un acquis, peu de décideurs le considèrent à sa juste valeur. Nous pourrions pourtant faire mieux que ce soit sur la question de l'accueil, de l'anglais ou de la communication politique. Nous avons un pays extraordinaire qui réunit tous les ingrédients du rêve. Doté de paysages aussi divers qu'harmonieux et d'une histoire qui recèle tous les ingrédients du mythe. La conservation de cette place dépend surtout de notre volonté et de notre capacité à communiquer. Il est impératif d'alimenter notre rayonnement, ce que les américains appelleraient le soft power. Atout France réalise de nombreux efforts dans ce sens mais c'est une stratégie politique et touristique globale qu'il nous faut.