Paris, 1989 : Les coulisses du rachat
Nombreux ont été les témoins de l'âpre lutte pour le contrôle du groupe LVMH menée par Bernard Arnault en 1989 et 1990, aux dépens de l'homme d'affaires Henry Racamier alors propriétaire.
L’avocat Jean-Pierre Martel, fin connaisseur du monde des affaires, connu dans le cadre de l'affaire Tapie-Crédit Lyonnais, a également défendu le PDG de Louis Vuitton - Henry Racamier - face au jeune Bernard Arnault qui voulait à l'époque prendre les rênes de LVMH (Louis Vuitton - Moët Hennessy). Racamier avait fait carrière dans la sidérurgie mais épousa une arrière-petite fille de Louis Vuitton, dont il opéra la transformation à l’international en ouvrant de nombreuses boutiques. Maitre Martel témoigne alors de la nouveauté des méthodes utilisées, du moins pour la France.
A l’époque, l’utilisation de méthodes d’accès à des données stratégiques était établie aux Etats-Unis, avec des cabinets comme Kroll, qui s’installe à Paris en 1989. L’entreprise, fondée en 1972 par Jules Kroll, se spécialise rapidement dans le secteur des enquêtes financières. A la différence des agences gouvernementales, Kroll fait du renseignement privé. L’agence peut donc récupérer deux types d’information : l’« information blanche », accessible en source ouverte : l’OSINT (Open source intelligence) et l’« information grise », par l’investigation et les sources humaines : le HUMINT (Human Intelligence). Contrairement à l’espionnage, ces méthodes sont bien légales et appartiennent donc bien au champ de l’intelligence économique.
Arnault confie donc à Kroll la mission d’enquêter sur les comptes de Louis Vuitton. Des rumeurs vont alors sortir à cette occasion, accusant l’entreprise Louis Vuitton d’utiliser des circuits d’évasion fiscale via une holding à Hong Kong.
En parallèle de cette action, une campagne de presse va également être lancée pour influencer l’opinion publique et laisser croire qu’Henry Racamier serait un soutien financier important et un ami de Jean-Marie Le Pen.
Les méthodes d’influence sont donc ici multiples, et l’objectif très clair : mener une campagne multi-canaux pour désarmer Henry Racamier, non seulement sur le terrain économique mais aussi sur sa vie privée et ses collaborateurs.
L’avocat Jean-Pierre Martel, fin connaisseur du monde des affaires, connu dans le cadre de l'affaire Tapie-Crédit Lyonnais, a également défendu le PDG de Louis Vuitton - Henry Racamier - face au jeune Bernard Arnault qui voulait à l'époque prendre les rênes de LVMH (Louis Vuitton - Moët Hennessy). Racamier avait fait carrière dans la sidérurgie mais épousa une arrière-petite fille de Louis Vuitton, dont il opéra la transformation à l’international en ouvrant de nombreuses boutiques. Maitre Martel témoigne alors de la nouveauté des méthodes utilisées, du moins pour la France.
A l’époque, l’utilisation de méthodes d’accès à des données stratégiques était établie aux Etats-Unis, avec des cabinets comme Kroll, qui s’installe à Paris en 1989. L’entreprise, fondée en 1972 par Jules Kroll, se spécialise rapidement dans le secteur des enquêtes financières. A la différence des agences gouvernementales, Kroll fait du renseignement privé. L’agence peut donc récupérer deux types d’information : l’« information blanche », accessible en source ouverte : l’OSINT (Open source intelligence) et l’« information grise », par l’investigation et les sources humaines : le HUMINT (Human Intelligence). Contrairement à l’espionnage, ces méthodes sont bien légales et appartiennent donc bien au champ de l’intelligence économique.
Arnault confie donc à Kroll la mission d’enquêter sur les comptes de Louis Vuitton. Des rumeurs vont alors sortir à cette occasion, accusant l’entreprise Louis Vuitton d’utiliser des circuits d’évasion fiscale via une holding à Hong Kong.
En parallèle de cette action, une campagne de presse va également être lancée pour influencer l’opinion publique et laisser croire qu’Henry Racamier serait un soutien financier important et un ami de Jean-Marie Le Pen.
Les méthodes d’influence sont donc ici multiples, et l’objectif très clair : mener une campagne multi-canaux pour désarmer Henry Racamier, non seulement sur le terrain économique mais aussi sur sa vie privée et ses collaborateurs.
Une pression effective sur les différents acteurs, et la réponse du clan Vuitton
Cette crainte de subir une campagne d’influence et d’être espionnés ne semble pas uniquement le fruit d’une paranoïa. Jean-Claude Blouin, spécialiste de la protection rapprochée et homme de confiance d’Henry Racamier témoigne également sur l’affaire. Il assure avoir été suivi à plusieurs reprises par des voitures qui souhaitaient identifier les lieux de rendez-vous d’Henry Racamier. En raison de doutes déjà très forts, il fait également venir dans les locaux de Vuitton et dans le bureau de Monsieur Racamier une entreprise de « dépoussiérage ». Ces spécialistes de la chasse aux micros en dénichent deux. Manifestement, des complicités internes permettaient aux spécialistes commandités par Bernard Arnault d’installer des micros pendant la nuit.
Interrogé en 2014 dans Complément d’enquête sur France 2, Pierre Godé, vice-président de LVMH, contestait avoir fait mettre sur écoute Henry Racamier, rétorquant que lui-même avait été victime. Il atteste même avoir trouvé chez lui "une boîte (…) avec deux magnétophones qui se déclenchait quand le téléphone se décrochait.". Quand le journaliste lui demande alors s’il pense que cela pouvait provenir du clan Vuitton, il répond « C’est tout à fait possible ».
Côté Racamier, les anciens responsables de la sécurité ne nient pas avoir utilisé ces méthodes sur l’entourage de Bernard Arnault, en réponse aux actes dont ils subissaient la pression. "Monsieur Racamier ne voulait absolument pas utiliser ces méthodes de voyous, mais je reconnais que ça a été fait à son insu", accepte Jean-Claude Blouin.
Il est tout à fait possible que certains acteurs de cette affaire, notamment impliqués dans la pose de micros chez Vuitton, aient pu faire double-jeu et poser également des appareils d’enregistrement chez les proche de Bernard Arnault ou même chez lui.
Interrogé en 2014 dans Complément d’enquête sur France 2, Pierre Godé, vice-président de LVMH, contestait avoir fait mettre sur écoute Henry Racamier, rétorquant que lui-même avait été victime. Il atteste même avoir trouvé chez lui "une boîte (…) avec deux magnétophones qui se déclenchait quand le téléphone se décrochait.". Quand le journaliste lui demande alors s’il pense que cela pouvait provenir du clan Vuitton, il répond « C’est tout à fait possible ».
Côté Racamier, les anciens responsables de la sécurité ne nient pas avoir utilisé ces méthodes sur l’entourage de Bernard Arnault, en réponse aux actes dont ils subissaient la pression. "Monsieur Racamier ne voulait absolument pas utiliser ces méthodes de voyous, mais je reconnais que ça a été fait à son insu", accepte Jean-Claude Blouin.
Il est tout à fait possible que certains acteurs de cette affaire, notamment impliqués dans la pose de micros chez Vuitton, aient pu faire double-jeu et poser également des appareils d’enregistrement chez les proche de Bernard Arnault ou même chez lui.
L’actualité de ces méthodes
Dix ans plus tard, en 1999 Bernard Arnault, devenu PDG de LVMH, et François Pinault, vont lutter avec des méthodes similaires pour la prise de contrôle de Gucci, avec une série de procès et d'appels, de communiqués de victoire des deux camps et démentis. Presque 20 ans plus tard, en 2008, Bernard Arnault refait parler de lui pour l’emploi de ces méthodes. LVMH, maintenant dirigé par Arnault, demande alors à Bernard Squarcini, l’ancien patron du renseignement intérieur, de l'aider à identifier un maître-chanteur. Celui-ci menaçait en effet de rendre publiques des photos privées impliquant le milliardaire.
En dehors de toute action judiciaire, un dispositif de surveillance est alors mis en place, utilisant plusieurs équipes d’agents de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, aujourd’hui DGSI) à Paris et à Aix. Une fois l’individu identifié, le groupe a préféré régler l’affaire lui-même et ne saisira jamais la justice.
En décembre 2021, le groupe a finalement dû payer 10 millions d’euros pour faire abandonner les poursuites du tribunal à propos des systèmes d’espionnage mis en place par Bernard Squarcini.
En dehors de toute action judiciaire, un dispositif de surveillance est alors mis en place, utilisant plusieurs équipes d’agents de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, aujourd’hui DGSI) à Paris et à Aix. Une fois l’individu identifié, le groupe a préféré régler l’affaire lui-même et ne saisira jamais la justice.
En décembre 2021, le groupe a finalement dû payer 10 millions d’euros pour faire abandonner les poursuites du tribunal à propos des systèmes d’espionnage mis en place par Bernard Squarcini.