(credit : freedigitlaphotos.net)
Des risques protéiformes
Toute activité présente son lot de dangers. Le risque zéro n’existe pas, même si toutes les activités ne présentent pas les mêmes dangers. Mais la maitrise de ces risques est pour autant une activité indissociable de l’activité de production ou de services.
Les risques ne sont naturellement pas les mêmes selon que l’on exploite une centrale nucléaire en zone sismique ou un fonds de pension installé dans une tour de la Défense. De la catastrophe naturelle aux risques financiers, il s’agit d’identifier et de gérer, au cas par cas, les risques et les « externalités négatives », c’est-à-dire les conséquences néfastes de l’activité sans lien avec les transactions économiques. De la pollution industrielle au risque de faillite, ces externalités sont en plus évolutives dans le temps : le vieillissement des infrastructures comme les bulles spéculatives sont autant de facteurs d’accroissement des risques. Mais, d’une protection tournée vers les salariés, la tendance évolue désormais vers une maitrise des risques sectoriels, nécessairement plus complexes à appréhender.
Des problématiques individuelles…
L’immense majorité des entrepreneurs a toujours considéré comme étant de sa responsabilité d’offrir un cadre et des conditions de travail sûrs et sécurisés à leurs salariés. Les coûts humain, financier et juridique d’un accident sont de toute façon suffisamment dissuasifs pour interdire à quiconque de jouer avec la sécurité. Citant l’exemple des entreprises du BTP, Georges Weber, consultant en santé et sécurité du travail, insiste sur le fait que « la prévention des risques dans le BTP n’est pas un coût, mais un atout. […] Un employeur qui expose un salarié à un risque identifié, sans prendre les mesures de protection appropriées, manque à cette obligation de sécurité de résultat. La prévention des risques professionnels est un enjeu majeur pour les employeurs. »
Mais au-delà de la seule conformité avec la loi, nombre de secteurs voient se mettre en place des dispositifs supplémentaires : plan de prévention des risques naturels ou technologiques, exercices d’évacuation, mesures de sécurité informatique…jusqu’aux séances de coaching et de relaxation pour lutter contre le stress. Pour excessives que peuvent paraitre ces dernières initiatives, il n’en demeure pas moins qu’un salarié en bonne santé physique et mentale est plus performant. Philippe Douillet, chef de projet « Prévention des Risques Psycho-sociaux (RPS) » auprès de l’ANACT, rappelle que « si le sujet RPS est aujourd'hui clairement entré dans les politiques de prévention des grandes entreprises et de plus en plus, également dans les PME, […] la prévention des RPS est encore jeune dans les entreprises. » Au-delà des seuls salariés, la place de plus en plus grande accordée au respect de principes éthiques et à l’environnement, quel que soit le secteur d’activité, a conduit à réguler certaines branches, souvent sous la pression de l’actualité.
…Aux risques sectoriels
Les normes environnementales contre les pollutions industrielles sont désormais anciennes, mais l’industrie lourde est loin d’être la seule à faire l’objet de réglementations sur les externalités négatives, probables ou réalisées. Dans le secteur bancaire, la prévention du risque bancaire est passée depuis 2008 par l’adoption de normes prudentielles dites Bâle 3. « L’objectif de la réglementation Bâle III est très simple : réduire le risque de faillite bancaire. Pour cela, la réforme propose deux piliers : renforcer les fonds propres bancaires et réduire le risque de liquidité. Les fonds propres seront renforcés en quantité (pourcentage de couverture des expositions multiplié par trois) et en qualité », explique Adrian Paturle, gérant de plusieurs fonds pour la société de gestion Axiom Alternative Investments.
Dans le domaine des assurances, la norme Solvabilité 2 (ou « Solva 2 ») remplit les mêmes offices. Pour Bertrand Da Ros, directeur général de la mutuelle SMI, « La finalité de Solva 2 est avant tout prudentielle et ses objectifs sont multiples. […] Il s’agit tout d’abord de mieux évaluer nos risques, afin de mettre en œuvre les plans d’action susceptibles de garantir à nos adhérents le respect de nos engagements en tant qu’assureur. Enfin, cette directive va dans le sens d’une plus grande transparence des assureurs vis-à-vis du public. En érigeant ces règles au rang d’obligation, l’Union européenne a souhaité doter ses pays membres des moyens légaux de prévenir toute crise dans le secteur de l’assurance. » En s’imposant comme une nécessité de prise en compte global de « l’environnement des affaires », la gestion des risques et des externalités négatives est devenue de fait la première pierre des politiques RSE.
Des règlementations prudentielles à la RSE : la transparence avant tout
Certaines entreprises n’ont pas attendu les obligations légales pour développer de véritables politiques RSE. « Au sein de la Mutuelle SMI, nous avons lancé un programme de convergence dès 2009 pour être prêts dans les délais. […] Nous sommes, nous avons été et nous resterons vigilants concernant l'équilibre technique des contrats et des produits que nous assurons. Cela relève des principes de développement durable qui sont les nôtres qui se trouvent d’ailleurs au cœur de notre culture mutualiste », insiste Bertrand Da Ros. Le statut d’association à but non lucratif de la Mutuelle SMI y est pour beaucoup : structure à gouvernance démocratique, elle s’adapte aisément aux principes de gestion imposés par Solva 2. Mais toutes les entreprises ne peuvent pas en dire de même.
Perçue à tort à ses débuts comme une lubie « d’écolo-mécène », la RSE s’est depuis imposée comme une vision renouvelée de la place des entreprises dans la société. « Les stratégies de RSE visent à gérer les externalités négatives » résume Jean-Pascal Gond, spécialiste de la RSE et professeur à la Cass Business School, City University de Londres.
Il ne suffit plus de planter un bosquet en France lorsque l’on déboise au Bangladesh ; il s’agit désormais de concevoir globalement la place de l’activité de l’entreprise dans la société, en termes d’externalités positives, et en lien si possible avec son activité principale.
C’est là que le reporting extra-financier prend toute son importance : loin de se limiter à une action de communication, le reporting extra-financier est devenue la condition sine qua non de la transparence et donc de la crédibilité des politiques RSE. Conséquence de l’article 225 de la loi Grenelle 2, l’obligation de reporting va obliger les administrateurs à « mieux prendre en compte les thématiques RSE et inscrire à leur agenda de nouveaux sujets de responsabilité sociétale tels que les politiques de protection de l’environnement, de ressources humaines, d’éthique ou de conformité », explique Daniel Lebègue, président de Transparency International France.
Une première approche de la RSE se résumerait donc à cela : transparence et vision proactive de la gestion des risques. Pas forcément plus, mais surtout pas moins.
Toute activité présente son lot de dangers. Le risque zéro n’existe pas, même si toutes les activités ne présentent pas les mêmes dangers. Mais la maitrise de ces risques est pour autant une activité indissociable de l’activité de production ou de services.
Les risques ne sont naturellement pas les mêmes selon que l’on exploite une centrale nucléaire en zone sismique ou un fonds de pension installé dans une tour de la Défense. De la catastrophe naturelle aux risques financiers, il s’agit d’identifier et de gérer, au cas par cas, les risques et les « externalités négatives », c’est-à-dire les conséquences néfastes de l’activité sans lien avec les transactions économiques. De la pollution industrielle au risque de faillite, ces externalités sont en plus évolutives dans le temps : le vieillissement des infrastructures comme les bulles spéculatives sont autant de facteurs d’accroissement des risques. Mais, d’une protection tournée vers les salariés, la tendance évolue désormais vers une maitrise des risques sectoriels, nécessairement plus complexes à appréhender.
Des problématiques individuelles…
L’immense majorité des entrepreneurs a toujours considéré comme étant de sa responsabilité d’offrir un cadre et des conditions de travail sûrs et sécurisés à leurs salariés. Les coûts humain, financier et juridique d’un accident sont de toute façon suffisamment dissuasifs pour interdire à quiconque de jouer avec la sécurité. Citant l’exemple des entreprises du BTP, Georges Weber, consultant en santé et sécurité du travail, insiste sur le fait que « la prévention des risques dans le BTP n’est pas un coût, mais un atout. […] Un employeur qui expose un salarié à un risque identifié, sans prendre les mesures de protection appropriées, manque à cette obligation de sécurité de résultat. La prévention des risques professionnels est un enjeu majeur pour les employeurs. »
Mais au-delà de la seule conformité avec la loi, nombre de secteurs voient se mettre en place des dispositifs supplémentaires : plan de prévention des risques naturels ou technologiques, exercices d’évacuation, mesures de sécurité informatique…jusqu’aux séances de coaching et de relaxation pour lutter contre le stress. Pour excessives que peuvent paraitre ces dernières initiatives, il n’en demeure pas moins qu’un salarié en bonne santé physique et mentale est plus performant. Philippe Douillet, chef de projet « Prévention des Risques Psycho-sociaux (RPS) » auprès de l’ANACT, rappelle que « si le sujet RPS est aujourd'hui clairement entré dans les politiques de prévention des grandes entreprises et de plus en plus, également dans les PME, […] la prévention des RPS est encore jeune dans les entreprises. » Au-delà des seuls salariés, la place de plus en plus grande accordée au respect de principes éthiques et à l’environnement, quel que soit le secteur d’activité, a conduit à réguler certaines branches, souvent sous la pression de l’actualité.
…Aux risques sectoriels
Les normes environnementales contre les pollutions industrielles sont désormais anciennes, mais l’industrie lourde est loin d’être la seule à faire l’objet de réglementations sur les externalités négatives, probables ou réalisées. Dans le secteur bancaire, la prévention du risque bancaire est passée depuis 2008 par l’adoption de normes prudentielles dites Bâle 3. « L’objectif de la réglementation Bâle III est très simple : réduire le risque de faillite bancaire. Pour cela, la réforme propose deux piliers : renforcer les fonds propres bancaires et réduire le risque de liquidité. Les fonds propres seront renforcés en quantité (pourcentage de couverture des expositions multiplié par trois) et en qualité », explique Adrian Paturle, gérant de plusieurs fonds pour la société de gestion Axiom Alternative Investments.
Dans le domaine des assurances, la norme Solvabilité 2 (ou « Solva 2 ») remplit les mêmes offices. Pour Bertrand Da Ros, directeur général de la mutuelle SMI, « La finalité de Solva 2 est avant tout prudentielle et ses objectifs sont multiples. […] Il s’agit tout d’abord de mieux évaluer nos risques, afin de mettre en œuvre les plans d’action susceptibles de garantir à nos adhérents le respect de nos engagements en tant qu’assureur. Enfin, cette directive va dans le sens d’une plus grande transparence des assureurs vis-à-vis du public. En érigeant ces règles au rang d’obligation, l’Union européenne a souhaité doter ses pays membres des moyens légaux de prévenir toute crise dans le secteur de l’assurance. » En s’imposant comme une nécessité de prise en compte global de « l’environnement des affaires », la gestion des risques et des externalités négatives est devenue de fait la première pierre des politiques RSE.
Des règlementations prudentielles à la RSE : la transparence avant tout
Certaines entreprises n’ont pas attendu les obligations légales pour développer de véritables politiques RSE. « Au sein de la Mutuelle SMI, nous avons lancé un programme de convergence dès 2009 pour être prêts dans les délais. […] Nous sommes, nous avons été et nous resterons vigilants concernant l'équilibre technique des contrats et des produits que nous assurons. Cela relève des principes de développement durable qui sont les nôtres qui se trouvent d’ailleurs au cœur de notre culture mutualiste », insiste Bertrand Da Ros. Le statut d’association à but non lucratif de la Mutuelle SMI y est pour beaucoup : structure à gouvernance démocratique, elle s’adapte aisément aux principes de gestion imposés par Solva 2. Mais toutes les entreprises ne peuvent pas en dire de même.
Perçue à tort à ses débuts comme une lubie « d’écolo-mécène », la RSE s’est depuis imposée comme une vision renouvelée de la place des entreprises dans la société. « Les stratégies de RSE visent à gérer les externalités négatives » résume Jean-Pascal Gond, spécialiste de la RSE et professeur à la Cass Business School, City University de Londres.
Il ne suffit plus de planter un bosquet en France lorsque l’on déboise au Bangladesh ; il s’agit désormais de concevoir globalement la place de l’activité de l’entreprise dans la société, en termes d’externalités positives, et en lien si possible avec son activité principale.
C’est là que le reporting extra-financier prend toute son importance : loin de se limiter à une action de communication, le reporting extra-financier est devenue la condition sine qua non de la transparence et donc de la crédibilité des politiques RSE. Conséquence de l’article 225 de la loi Grenelle 2, l’obligation de reporting va obliger les administrateurs à « mieux prendre en compte les thématiques RSE et inscrire à leur agenda de nouveaux sujets de responsabilité sociétale tels que les politiques de protection de l’environnement, de ressources humaines, d’éthique ou de conformité », explique Daniel Lebègue, président de Transparency International France.
Une première approche de la RSE se résumerait donc à cela : transparence et vision proactive de la gestion des risques. Pas forcément plus, mais surtout pas moins.