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L’intelligence économique comme arme économique et géopolitique : le cas Motorola-Huawei




Publié par Marc Delaplace le 15 Mai 2023

En juillet 2010, Motorola a déposé une plainte à l’encontre de la société chinoise Huawei car celle-ci aurait mis en place plusieurs stratégies d’espionnage industriel depuis 2001. Plusieurs employés auraient été employés par Huawei dans le but de récupérer des informations confidentielles, notamment Shaowei Pan, un ancien employé de Motorola qui a créé sa propre entreprise, Lemko Corp, qui transmettait des informations confidentielles à Ren Zhengfei, le PDG et fondateur de Huawei.



Une affaire d’espionnage industriel

En septembre 2008, l’entreprise américaine Motorola a lancé une poursuite judiciaire sur cinq de ses anciens employés, dont quatre avaient la nationalité chinoise. Ces employés sont accusés d’avoir transmis des informations confidentielles sur certaines caractéristiques techniques de certains produits Motorola à l’entreprise chinoise Huawei. Deux ans plus tard, l’affaire continue avec cette fois un total de 10 employés accusés, notamment Shaowei Pan. Shaowei Pan est un ancien employé de Motorola qui a quitté l’entreprise pour fonder sa propre entreprise, Lemko Corp, qui a pour but de fournir des réseaux 4G/5G. Face à ces accusations, un juge a autorisé la saisie de l’ordinateur de Shaowei Pan. Les informations recueillies sont alors pour le moins préoccupantes. En effet, Shaowei Pan aurait utiliser un logiciel pour effacer toute trace compromettante. Les experts ont également trouvé un fichier « confidentiel » relatif à Motorola dans la boîte mail de l’ex-employé. Ce mail a d’ailleurs été envoyé à Ren Zhengfei, PDG de Huawei. Le vol d’informations concernerait notamment le système SC 300 (un émetteur-récepteur) de Motorola. Il est donc clair que Huawei a cherché et cherche à s’approprier des technologies, informations et savoir-faire via l’espionnage industriel.

Pourtant, cette situation n’a rien de nouveau pour Huawei.
 

Une situation bien connue pour Huawei…

Ces accusations d’espionnage industriel n’ont rien de nouveau pour Huawei. En 2004, c’est l’entreprise Cisco qui avait initié une action en justice. En 2011, un an plus tard, c’est Renault qui l’accuse d’espionnage. De manière plus récente, de nombreux doutes planent sur l’entreprise chinoise quant au fait qu’elle collecterait des données privées via ces appareils et réseaux. De nombreux doutes planent également en raison des liens entre l’entreprise et le gouvernement chinois. En effet, Huawei a été créé par Ren Zhengfei, un ancien ingénieur de l’armée populaire de libération chinoise. L’espionnage industriel est parfaitement illégal, mais l’intelligence économique elle, est absolument légal. Ce sont deux méthodes de collecte de renseignements. La Chine cherche par tous les moyens d’acquérir des technologies étrangères pour rattraper son retard, produire en Chine et écraser ses concurrents. Le gouvernement chinois a d’ailleurs mis en place une politique d’intelligence économique au service de son hégémonie.
 

… au service de l’hégémonie chinoise

La population chinoise est connue pour être très patriotique (par choix ou non), le gouvernement compte alors souvent sur eux pour récupérer des informations au près d’entreprises étrangères. Tout cela a pour objectif de s’approprier des technologies et des savoir-faire afin de produire nationalement ces produits. Le but est de rivaliser avec les entreprises étrangères et proposer des produits de qualité équivalente voire de meilleure qualité à un prix inférieur. Cela permettra à la Chine d’exporter ses produits dans les pays occidentaux mais aussi et surtout dans les pays en développement, notamment en Afrique où la Chine y mène depuis quelques années un programme d’investissements majeurs.

Aujourd’hui, tout le monde connaît les marques comme Huawei, , Xiaomi, Honor, One Plus pour les téléphones, Lenovo pour les ordinateurs, Hisense pour l’électroménager ou encore Shein pour les vêtements. Cette stratégie de remontée technologique et de captation de technologies et de savoir-faire par l’intelligence économique a permis à la Chine de rattraper son retard technologique et économique en quelques années et ainsi conquérir les marchés étrangers en les inondant de produits 100% chinois.
 

Mais alors, quelle est la forme de la politique d’intelligence économique chinoise ?

La politique d’intelligence économique est pensée au sommet de l’Etat puis redirigée vers les ministères et ensuite vers certaines entreprises. Il existe en Chine deux centres public d’intelligence économique qui ont pour mission de conseiller les entreprises chinoises en la matière. Cependant, les grandes entreprises chinoises ont leur propre service d’intelligence économique. Le gouvernement chinois récupère ensuite les informations qu’il souhaite via les centres d’intelligence économique ou via les entreprises directement.

L’intelligence économique est véritablement perçue par le gouvernement chinois comme une arme économique et géopolitique permettant d’acquérir du renseignement, des technologies et des savoir-faire dans le but de s’expandre économiquement et conquérir des parts des marchés avec des produits 100% chinois. L’objectif est d’affirmer l’hégémonie chinoise sur la scène internationale en prouvant que la Chine est à même de produire n’importe quel produit avec une qualité impressionnante. Après avoir montré que la Chine était l’usine du monde, la Chine chercher aussi à montrer qu’elle est le centre de conception du monde, tout en travaillant sur l’aspect culturel en inondant le monde de marque chinoise.
 



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