Quelques points de convergence
Les cinq États d'Asie centrale, devenus indépendants à la chute de l'URSS en 1991, ont toutefois conservé à partir de ce moment une certaine longévité du pouvoir à travers leurs dirigeants. En effet, les présidents de l'Ouzbékistan (Islom Karimov), du Turkménistan (Saparmyrat Nyyazow) et du Kirghizstan (Askar Askayev) se sont maintenus au pouvoir pendant quinze ans, celui du Kazakhstan (Nursultan Nazarbayev) pendant vingt-neuf ans et celui du Tadjikistan (Emomalii Rahmon) "seulement" pendant vingt-sept ans, mais est toujours en poste actuellement.
Par ailleurs, si le Kirghizstan semble exempté, nous assistons à une "dynastisation" de la politique en Asie centrale. En ce sens que les dirigeants en place semblent préparer leur descendance à leur succéder le moment venu. Au Kazakhstan, si des rumeurs indiquaient que Dariga Nazarbayeva remplacerait directement son père à la présidence, elle remplaça finalement Kassym-Jomart Tokayev, le nouveau président, à la tête du Sénat. Au Tadjikistan, Rustam Emomalii est actuellement maire de la capitale, Douchanbé. En Ouzbékistan, Saida Mirziyoyev a récemment été placée à la tête d'une agence étatique en charge de la communication et des médias. Enfin, au Turkménistan, Serdar Berdimuhamedow est, depuis le début de l'année, gouverneur de la province d’Ahal.
Les cinq États d'Asie centrale, devenus indépendants à la chute de l'URSS en 1991, ont toutefois conservé à partir de ce moment une certaine longévité du pouvoir à travers leurs dirigeants. En effet, les présidents de l'Ouzbékistan (Islom Karimov), du Turkménistan (Saparmyrat Nyyazow) et du Kirghizstan (Askar Askayev) se sont maintenus au pouvoir pendant quinze ans, celui du Kazakhstan (Nursultan Nazarbayev) pendant vingt-neuf ans et celui du Tadjikistan (Emomalii Rahmon) "seulement" pendant vingt-sept ans, mais est toujours en poste actuellement.
Par ailleurs, si le Kirghizstan semble exempté, nous assistons à une "dynastisation" de la politique en Asie centrale. En ce sens que les dirigeants en place semblent préparer leur descendance à leur succéder le moment venu. Au Kazakhstan, si des rumeurs indiquaient que Dariga Nazarbayeva remplacerait directement son père à la présidence, elle remplaça finalement Kassym-Jomart Tokayev, le nouveau président, à la tête du Sénat. Au Tadjikistan, Rustam Emomalii est actuellement maire de la capitale, Douchanbé. En Ouzbékistan, Saida Mirziyoyev a récemment été placée à la tête d'une agence étatique en charge de la communication et des médias. Enfin, au Turkménistan, Serdar Berdimuhamedow est, depuis le début de l'année, gouverneur de la province d’Ahal.
Le Kazakhstan comme chef de file
Nous l'avons vu dans un précédent article, le Kazakhstan est l'État le plus grand et le plus riche de la région. Cela est notamment dû à l'exploitation de gaz, de pétrole et d'uranium. En décembre 2012, le désormais ex-président Nursultan Nazarbayev a annoncé le lancement de la 2050 Strategy. À travers des projets économiques, culturels et architecturaux, l'objectif est de faire du Kazakhstan l'une des trente premières économies mondiales d'ici 2030. L'idée est aussi d'améliorer les conditions de vie des citoyens kazakhstanais.
D'un point de vue architectural, les villes de Nur-Sultan (ex-Astana) et d'Almaty (ancienne capitale) ont adopté un style futuriste. En 1998, avec le changement de Capitale, N. Nazarbayev souhaita asseoir sa légitimité en créant une ville à l'image de son pouvoir. Pour cela, il fit venir des architectes reconnus pour concevoir des bâtiments. Ce fut notamment le cas du Britannique Norman Foster, spécialiste des structures néofuturistes, qui dessina le Khan Shatyr, un immense parc d'activités.
Enfin, en comparaison avec ses voisins, le Kazakhstan est un "monstre économique". En effet, si nous regardons simplement le PIB de chacun de ces États, nous nous apercevons que celui du Kazakhstan est supérieur à celui des quatre autres réunis (en 2017 : 162,9 milliards de dollars contre 102,3 milliards).
L'Ouzbékistan et le Turkménistan
À partir de leur indépendance, ces deux États ont eu à leur tête des dirigeants souvent qualifiés de "dictateurs sanglants", Islam Karimov et Saparmyrat Nyyazow. Si la question de l'autoritarisme sera abordée dans un prochain article, nous pouvons toutefois indiquer que l'Ouzbékistan et le Turkménistan se rejoignirent notamment sur cette surutilisation de la torture et de la violence en général.
Si, aujourd'hui, nous l'avons vu, le Kazakhstan est le moteur de la région, l'Ouzbékistan était à l'origine le pays avec le plus grand potentiel. Cependant, l'État ouzbek n'a jamais réalisé ses promesses de leadership. Pire, alors qu'en 2016, le PIB ouzbek était presque deux fois supérieur à celui du Turkménistan (67,5 milliards de dollars contre 36,2 milliards), il a connu un fort contrecoup à la mort d'Islom Karimov. Tant est si bien qu'en 2017, le PIB des deux États tend à se rapprocher (49,7 milliards de dollars contre 37,9 milliards).
Si l'Ouzbékistan et le Turkménistan sont ici mis ensemble, c'est avant tout en raison de l'aspect économique. Car, si nous observons les régimes politiques, ces deux États ne partagent plus leur caractère dictatorial d'antan. À Islom Karimov a succédé Shavkat Mirziyoyev qui, dès son arrivée au pouvoir en 2016, libéra des prisonniers politiques et ouvrit le pays aux capitaux étrangers. À l'inverse, du côté du Turkménistan, si Gurbanguly Berdimuhamedow a remplacé Saparmyrat Nyyazow en 2006, le pays ne s'est pas pour autant détourné du culte de la personnalité et des tendances quasi totalitaires qui s'y jouent.
Le Kirghizstan et le Tadjikistan
Le Kirghizstan et le Tadjikistan sont les deux plus petits États parmi les cinq anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale et les deux pays ayant les PIB les plus faibles. Par ailleurs, ils se rejoignent aussi sur le taux d'ouverture de leur économie (1). Sur la décennie 2008-2017, leurs courbes respectives ont globalement la même forme : un taux d'ouverture plutôt élevé en 2008 qui a chuté jusqu'en 2010, avant de remonter jusqu'en 2012, puis de diminuer drastiquement jusqu'en 2017. À cette date, parmi les cinq États, seul le Kirghizstan a un taux d'ouverture supérieur à 50 %.
Selon des données de la Banque mondiale (2), le Kirghizstan est, dans la région, le pays où les habitants ont la plus forte participation aux décisions politiques. Cela fut permis par deux révolutions, en 2005 et en 2010. En 2005, la "révolution des Tulipes" renverse le président Askar Akayev, de plus en plus autoritaire, suite à des soupçons de fraude lors des élections législatives. Il fut remplacé par Kurmanbek Bakiev. En 2010, ce dernier fut à son tour renversé par un mouvement révolutionnaire pour les mêmes raisons. Le président russe de l'époque, Dmitri Medvedev, indiqua que le pays était "au seuil d'une guerre civile". Roza Otunbayeva devint la Présidente par intérim et, par référendum, permit au Kirghizstan d'adopter un régime parlementaire. Depuis lors, le pays est vu comme étant le plus démocratique de la région.
Peu de temps après son indépendance, le Tadjikistan sombra dans une guerre civile entre 1992 et 1997. Celle-ci opposa le régime, soutenu par la Russie et l'Ouzbékistan, au camp "islamo-démocrate", soutenu par al-Qaida et les Talibans. Ce camp était une coalition de forces démocrates, de séparatistes du Haut-Badakhshan, de nationalistes et d’islamistes. Un accord de paix fut toutefois permis par l’ONU avec la tenue d’élections qui virent le maintien du président Emomalii Rahmon, toujours en poste actuellement. Certains spécialistes expliquent cette longévité au pouvoir par le fait que la population, marquée par la guerre civile, préfère la continuité à des risques d’instabilité politique.
Nous l'avons vu dans un précédent article, le Kazakhstan est l'État le plus grand et le plus riche de la région. Cela est notamment dû à l'exploitation de gaz, de pétrole et d'uranium. En décembre 2012, le désormais ex-président Nursultan Nazarbayev a annoncé le lancement de la 2050 Strategy. À travers des projets économiques, culturels et architecturaux, l'objectif est de faire du Kazakhstan l'une des trente premières économies mondiales d'ici 2030. L'idée est aussi d'améliorer les conditions de vie des citoyens kazakhstanais.
D'un point de vue architectural, les villes de Nur-Sultan (ex-Astana) et d'Almaty (ancienne capitale) ont adopté un style futuriste. En 1998, avec le changement de Capitale, N. Nazarbayev souhaita asseoir sa légitimité en créant une ville à l'image de son pouvoir. Pour cela, il fit venir des architectes reconnus pour concevoir des bâtiments. Ce fut notamment le cas du Britannique Norman Foster, spécialiste des structures néofuturistes, qui dessina le Khan Shatyr, un immense parc d'activités.
Enfin, en comparaison avec ses voisins, le Kazakhstan est un "monstre économique". En effet, si nous regardons simplement le PIB de chacun de ces États, nous nous apercevons que celui du Kazakhstan est supérieur à celui des quatre autres réunis (en 2017 : 162,9 milliards de dollars contre 102,3 milliards).
L'Ouzbékistan et le Turkménistan
À partir de leur indépendance, ces deux États ont eu à leur tête des dirigeants souvent qualifiés de "dictateurs sanglants", Islam Karimov et Saparmyrat Nyyazow. Si la question de l'autoritarisme sera abordée dans un prochain article, nous pouvons toutefois indiquer que l'Ouzbékistan et le Turkménistan se rejoignirent notamment sur cette surutilisation de la torture et de la violence en général.
Si, aujourd'hui, nous l'avons vu, le Kazakhstan est le moteur de la région, l'Ouzbékistan était à l'origine le pays avec le plus grand potentiel. Cependant, l'État ouzbek n'a jamais réalisé ses promesses de leadership. Pire, alors qu'en 2016, le PIB ouzbek était presque deux fois supérieur à celui du Turkménistan (67,5 milliards de dollars contre 36,2 milliards), il a connu un fort contrecoup à la mort d'Islom Karimov. Tant est si bien qu'en 2017, le PIB des deux États tend à se rapprocher (49,7 milliards de dollars contre 37,9 milliards).
Si l'Ouzbékistan et le Turkménistan sont ici mis ensemble, c'est avant tout en raison de l'aspect économique. Car, si nous observons les régimes politiques, ces deux États ne partagent plus leur caractère dictatorial d'antan. À Islom Karimov a succédé Shavkat Mirziyoyev qui, dès son arrivée au pouvoir en 2016, libéra des prisonniers politiques et ouvrit le pays aux capitaux étrangers. À l'inverse, du côté du Turkménistan, si Gurbanguly Berdimuhamedow a remplacé Saparmyrat Nyyazow en 2006, le pays ne s'est pas pour autant détourné du culte de la personnalité et des tendances quasi totalitaires qui s'y jouent.
Le Kirghizstan et le Tadjikistan
Le Kirghizstan et le Tadjikistan sont les deux plus petits États parmi les cinq anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale et les deux pays ayant les PIB les plus faibles. Par ailleurs, ils se rejoignent aussi sur le taux d'ouverture de leur économie (1). Sur la décennie 2008-2017, leurs courbes respectives ont globalement la même forme : un taux d'ouverture plutôt élevé en 2008 qui a chuté jusqu'en 2010, avant de remonter jusqu'en 2012, puis de diminuer drastiquement jusqu'en 2017. À cette date, parmi les cinq États, seul le Kirghizstan a un taux d'ouverture supérieur à 50 %.
Selon des données de la Banque mondiale (2), le Kirghizstan est, dans la région, le pays où les habitants ont la plus forte participation aux décisions politiques. Cela fut permis par deux révolutions, en 2005 et en 2010. En 2005, la "révolution des Tulipes" renverse le président Askar Akayev, de plus en plus autoritaire, suite à des soupçons de fraude lors des élections législatives. Il fut remplacé par Kurmanbek Bakiev. En 2010, ce dernier fut à son tour renversé par un mouvement révolutionnaire pour les mêmes raisons. Le président russe de l'époque, Dmitri Medvedev, indiqua que le pays était "au seuil d'une guerre civile". Roza Otunbayeva devint la Présidente par intérim et, par référendum, permit au Kirghizstan d'adopter un régime parlementaire. Depuis lors, le pays est vu comme étant le plus démocratique de la région.
Peu de temps après son indépendance, le Tadjikistan sombra dans une guerre civile entre 1992 et 1997. Celle-ci opposa le régime, soutenu par la Russie et l'Ouzbékistan, au camp "islamo-démocrate", soutenu par al-Qaida et les Talibans. Ce camp était une coalition de forces démocrates, de séparatistes du Haut-Badakhshan, de nationalistes et d’islamistes. Un accord de paix fut toutefois permis par l’ONU avec la tenue d’élections qui virent le maintien du président Emomalii Rahmon, toujours en poste actuellement. Certains spécialistes expliquent cette longévité au pouvoir par le fait que la population, marquée par la guerre civile, préfère la continuité à des risques d’instabilité politique.
Notes
(1) Le taux d’ouverture représente la part des échanges internationaux (exportations et importations) dans l’économie d’un État (son PIB). Un taux d’ouverture est élevé traduit une économie ouverte sur le reste du monde, tandis qu’un taux d’ouverture faible indique une sorte d’autarcie de la part de l’État.
(2) Ces données sont les World Governance Indicators (WGI). Elles établissent des notes à six aspects de la gouvernance d’un État. Dans le cas dont nous parlons, il s’agit de l’axe Voice and Accountability abordant la question la participation de la population au choix des dirigeants politiques, abordant aussi la liberté d’expression, la liberté d’association et la liberté des médias.
Sources
« L’Asie centrale, une région instable ? », Novastan, 17/05/19.
« L’économie du Tadjikistan toujours très dépendante, juge une agence de notation », Novastan, 19/12/19.
CAGNAT René, « Ouzbékistan, l’après Karimov : des lendemains de discorde ? », Diploweb, 03/09/16.
KAHN Sylvain, « Achgabat (Turkménistan): ville hallucinée ? - suivi de - Asie centrale, la réhabilitation des quartiers précoloniaux », France Culture, 21/04/10.
ONFRAY Maxime, « Kazakhstan : le pilier économique de l’Asie centrale », ENDERI, 13/05/19.
(1) Le taux d’ouverture représente la part des échanges internationaux (exportations et importations) dans l’économie d’un État (son PIB). Un taux d’ouverture est élevé traduit une économie ouverte sur le reste du monde, tandis qu’un taux d’ouverture faible indique une sorte d’autarcie de la part de l’État.
(2) Ces données sont les World Governance Indicators (WGI). Elles établissent des notes à six aspects de la gouvernance d’un État. Dans le cas dont nous parlons, il s’agit de l’axe Voice and Accountability abordant la question la participation de la population au choix des dirigeants politiques, abordant aussi la liberté d’expression, la liberté d’association et la liberté des médias.
Sources
« L’Asie centrale, une région instable ? », Novastan, 17/05/19.
« L’économie du Tadjikistan toujours très dépendante, juge une agence de notation », Novastan, 19/12/19.
CAGNAT René, « Ouzbékistan, l’après Karimov : des lendemains de discorde ? », Diploweb, 03/09/16.
KAHN Sylvain, « Achgabat (Turkménistan): ville hallucinée ? - suivi de - Asie centrale, la réhabilitation des quartiers précoloniaux », France Culture, 21/04/10.
ONFRAY Maxime, « Kazakhstan : le pilier économique de l’Asie centrale », ENDERI, 13/05/19.