Un impératif stratégique
Ces sept pays (Allemagne, France, Grèce, Italie, Pays-Bas, Pologne et Espagne), tous utilisateurs ou futurs utilisateurs de drones, se sont engagés à lancer une nouvelle génération d’avions sans pilotes d’ici à l’horizon 2020. L’espoir, pour les armées comme pour les industriels, est grand. L’équipement de drones MALE (Moyenne Altitude, Longue Endurance) est désormais considéré comme un impératif central par la plupart des états-majors. LA question semble en effet ne pas être de savoir si oui ou non les armées du monde entier vont ou non s’équiper de drones, mais plutôt « quand ? ». Les deux pays faisant figure de leaders incontestés en la matière, les Etats-Unis et Israël, sont considérés, et ce depuis des années, comme incontournables sur le sujet. La multiplication de ses opérations extérieures, ces dernières années, a d’ailleurs fait comprendre au gouvernement français le caractère essentiel du drone dans les nouvelles modalités de déploiement en conflit, quelle que soit l’intensité. Dans cette perspective, le ministère de la défense, invoquant l’urgence, a annoncé en août l’achat de deux reaper américains, avec option d’achat de dix exemplaires supplémentaires. Cette décision a fait grincer des dents les industriels européens, mais a fait l’effet d’un véritable électrochoc : dès octobre, les principaux acteurs européens de la filière (EADS, Finmeccanica et Dassault) ont présenté un nouveau projet à la DGA et au ministère de la Défense français.
Quelles contraintes ?
Simple vœu pieu ? Pas vraiment. En proposant de remettre à jour le projet Talarion d’EADS, et en s’engageant à livrer un premier exemplaire d’ici à 2022, le tout sous le patronage d’EADS, les industriels semblent vouloir passer à la vitesse supérieure. Pour autant, il convient de rester prudent, puisque le même Talarion en est resté au stade de prototype précisément faute de volonté politique. Mais la volonté croissante de certains pays de s’émanciper de la tutelle américaine en la matière risque de faire bouger les choses. La France est ainsi en première ligne : faute d’accès au codage du Reaper et à un système de guidage et de liaison parfaitement autonome, la France n’achètera pas les 10 exemplaires supplémentaires. Ce scenario est hautement probable. Mais sera-ce suffisant pour donner vie à ce projet ? Manque de volonté politique, concurrence des industriels, problèmes d’interopérabilité, mauvaise identification des besoins, restrictions budgétaires… la liste des entraves à une nouvelle coopération fructueuse en la matière est longue. Néanmoins, le rôle de l’AED en la matière pourrait s’avérer central. Créée en 2004, cette agence pourrait être salutaire pour un nouveau projet de ce type, au moins en termes de coordination politique et surtout en termes d’identification des besoins. L’entente des principaux industriels sur un nouveau programme pourrait également convaincre les politiques de se décider rapidement. Tout comme le coût d’un tel programme. L’idée d’un drone européen est loin d’être neuve. Talarion, nEUROn, Telemos… les industriels ont multiplié les démonstrateurs. Peut-être ce nouveau projet sera l’occasion de créer enfin une véritable synergie de compétences en la matière ?