Malgré une culture assez bien gardée du secret entourant le détail des négociations des gros contrats d’armement, certains évènements malheureux parviennent toutefois aux oreilles du public et lui rappellent la complexité des arcanes de cette industrie. L’affaire Karachi a, par exemple, mis en lumière la mise en place d’un complexe réseau de commissions lors de la vente de navires de guerres et de sous-marins à l’Arabie Saoudite et au Pakistan. Cette corruption difficilement acceptable dans un monde idéal est en réalité monnaie courante dans cette industrie ou la concurrence n’est ni pure ni parfaite. Ces structures de facilitateurs ou d’entremetteurs sont malheureusement nécessaires pour remporter ces grands marchés. Une entreprise française ne pourra difficilement espérer décrocher un contrat dans un tel milieu là où ses concurrents risqueraient de ne pas avoir ces mêmes scrupules et où le pays acheteurs n’est pas trop regardant sur l’éthique des appels d’offre.
Du point de vu national, l’Etat est pris entre deux feux. Il doit combattre la corruption pour des raisons évidentes d’image. Par ailleurs il ne peut négliger les attentes politiques ou vénales de certaines parties prenantes lorsque l’obtention d’un contrat a des conséquences importantes en termes de souveraineté technologique ou de retombés économiques. Il déploie donc des moyens techniques ou humains afin de préserver l’indépendance et l’attractivité des industries nationales d’armement. C’est en effet en fournissant à ces industries une aide concrète sur la connaissance des réseaux d’influence, des particularités techniques de la concurrence, une mutualisation des efforts de veille, que l’Etat aide de façon « morale » ses entreprises. Le soutien ainsi prodigué n’est pas sans intérêt pour l’Etat qui garantit ainsi par l’indépendance et le niveau de ses industries de l’armement sa souveraineté.
La DGA (Direction Générale de l’Armement) s’efforce quant à elle de mutualiser les efforts de veille de l’ensemble des PME/ETI et grands groupes du tissu industriel national. C’est ainsi que son département ITE (Intelligence Technique et Economique) permet de garantir une veille efficace grâce à un puissant réseau d’informateurs professionnels parmi lesquels collabore occasionnellement la DRM (Direction du Renseignement Militaire). Par ailleurs, ITE propose également de la documentation classifiée et des outils d’analyse des données aux entreprises justifiant d’un tel besoin. Outre la collecte d’informations, le stockage de données cruciales sous le toit de la DGA permet une protection accrue que certaines entreprises ne pourraient assurer par manque de moyen / de compétences. L’évolution des technologies de big data ces dernières années a encouragé les investissements dans des outils informatiques capables de traiter toujours plus d’information. C’est ainsi que sont nés par exemple les programmes Artemis pour la DGA et Echelon pour la NSA américaine ayant tout deux pour ambition une veille et une analyse toujours plus complète. Ce n’est qu’en développant ces outils d’intelligence économique que l’Etat pourra répondre au besoin des PME de la défense tel que soulevé par le rapport des députés Caillaud et Michel.
Les grands contrats d’exports d’armement reposent en effet souvent sur un pilier public et un pilier privé. Il n’est pas rare que les grands groupes industriels sous-traitent l’intermédiation à des sociétés spécialisées. La société Eurotradia est notamment la filiale conseil en grand export d’Airbus, Thalès, MBDA, Dassault Aviation etc. Cette dernière à très récemment été racheté par l’ADIT (Agence pour la diffusion de l’information technologique), un des leaders français de l’intelligence économique et de l’intelligence stratégique. Ce rachat nous illustre les synergies et la coopération toujours plus essentielles entre les exportations d’armement et l’intelligence économique. Adit est en partie détenue par des fonds privés et en partie par des fonds publics (via l’agence des participations et la Bpi)
La connaissance des réseaux d’informations et d’influence est donc aussi important que la connaissance technique des produits concurrents. Seulement, l’activité d’intelligence économique dans le domaine des industries de défense ne se contente pas de redoubler d’efforts pour protéger des informations sensibles ou pour en collecter. Le développement de réseaux d’influence s’accompagne parfois de réelles entreprises d’influence voire même de déstabilisations ou de prédations d’entreprises concurrentes. Le retrait « d’obstacles stratégiques » s’effectue souvent par des guerres plus ou moins feutrés ou beaucoup de coups sont permis. Il n’est en effet pas rare que de véritables campagnes de déstabilisation soit mises en place par un dénigrement massif et organisé d’une décision ou du groupe de personne ayant prise cette décision.
La vente d’avions de chasse Rafale en Inde a été abordée par la presse française comme un succès bien qu’elle ait causé un véritable scandale en Inde. Ce dernier ne concernait pas directement l’offre technique de Dassault aviation mais plutôt les modalités du transfert de technologie entre la France et l’Inde. En lieu et place de favoriser HAL (Hindustan Aeronautics Limited), la grande entreprise nationale considérée favorite, Dassault Aviation a préféré tisser des liens avec Reliance en raison de pressions qu’elle « aurait reçues » par le gouvernement Modi. Anil Ambani, dirigeant de Reliance, est un ami proche du président indien ce qui soulève des craintes de conflits d’intérêts et a suscité une véritable remise en question de l’achat d’avions français par une grande partie de la presse locale.
La vente de matériel militaire peut motiver des manœuvres politiques (corruption, intercession, etc.) et le contraire est vrai également : une entreprise peut se faire contraindre puis attaquer en raison des liens politique qu’elle a tissés comme ce fût le cas pour Dassault Aviation en Inde alors que ceux-ci sont parfaitement licites. Il y a souvent d’habiles manipulateurs, au travers de cabinets d’intelligence économique (ou de services secrets), en charge de mener des investigations à charge et d’organiser des actions de déstabilisation.
De manière générale, les gros contrats d’armement sont souvent négociés avec le concours plus ou moins direct des Etats non pas uniquement du fait qu’il s’agisse d’une industrie souveraine, mais bien parce que ces contrats s’accompagnent le plus souvent d’un soutien politique et d’investissements de montants équivalents dans le pays acheteur par le pays vendeur. Les mauvaises langues argumenteront que ce point est souvent à l’avantage des américains qui parviennent à vendre des avions de combat à des pays (Belgique, Suisse, etc.) alors que les militaires de ces pays plébiscitaient d’autres fournisseurs plus proches… Il est donc primordial qu’une entreprise de l’industrie de l’armement sache élargir son offre technique pour y inclure ces autres avantages. Dans la mesure ou le produit n’est plus qu’une des nombreuses variables de l’équation, l’influence sur la partie acheteuse et la capacité à surpasser ses concurrents en termes d’offre ou d’image sont capitales. Ces derniers point sont évidemment des raisons du succès des entreprises d’intelligence économique qui viennent au soutien de ces industries à la fois opaques et où tous les coups sont permis. Pour une industrie d’armement, ne pas être doté d’un soutien par un cabinet d’intelligence économique en investigation mais aussi en influence revient à partir dans une compétition avec un handicap évident par rapport aux concurrents.
Du point de vu national, l’Etat est pris entre deux feux. Il doit combattre la corruption pour des raisons évidentes d’image. Par ailleurs il ne peut négliger les attentes politiques ou vénales de certaines parties prenantes lorsque l’obtention d’un contrat a des conséquences importantes en termes de souveraineté technologique ou de retombés économiques. Il déploie donc des moyens techniques ou humains afin de préserver l’indépendance et l’attractivité des industries nationales d’armement. C’est en effet en fournissant à ces industries une aide concrète sur la connaissance des réseaux d’influence, des particularités techniques de la concurrence, une mutualisation des efforts de veille, que l’Etat aide de façon « morale » ses entreprises. Le soutien ainsi prodigué n’est pas sans intérêt pour l’Etat qui garantit ainsi par l’indépendance et le niveau de ses industries de l’armement sa souveraineté.
La DGA (Direction Générale de l’Armement) s’efforce quant à elle de mutualiser les efforts de veille de l’ensemble des PME/ETI et grands groupes du tissu industriel national. C’est ainsi que son département ITE (Intelligence Technique et Economique) permet de garantir une veille efficace grâce à un puissant réseau d’informateurs professionnels parmi lesquels collabore occasionnellement la DRM (Direction du Renseignement Militaire). Par ailleurs, ITE propose également de la documentation classifiée et des outils d’analyse des données aux entreprises justifiant d’un tel besoin. Outre la collecte d’informations, le stockage de données cruciales sous le toit de la DGA permet une protection accrue que certaines entreprises ne pourraient assurer par manque de moyen / de compétences. L’évolution des technologies de big data ces dernières années a encouragé les investissements dans des outils informatiques capables de traiter toujours plus d’information. C’est ainsi que sont nés par exemple les programmes Artemis pour la DGA et Echelon pour la NSA américaine ayant tout deux pour ambition une veille et une analyse toujours plus complète. Ce n’est qu’en développant ces outils d’intelligence économique que l’Etat pourra répondre au besoin des PME de la défense tel que soulevé par le rapport des députés Caillaud et Michel.
Les grands contrats d’exports d’armement reposent en effet souvent sur un pilier public et un pilier privé. Il n’est pas rare que les grands groupes industriels sous-traitent l’intermédiation à des sociétés spécialisées. La société Eurotradia est notamment la filiale conseil en grand export d’Airbus, Thalès, MBDA, Dassault Aviation etc. Cette dernière à très récemment été racheté par l’ADIT (Agence pour la diffusion de l’information technologique), un des leaders français de l’intelligence économique et de l’intelligence stratégique. Ce rachat nous illustre les synergies et la coopération toujours plus essentielles entre les exportations d’armement et l’intelligence économique. Adit est en partie détenue par des fonds privés et en partie par des fonds publics (via l’agence des participations et la Bpi)
La connaissance des réseaux d’informations et d’influence est donc aussi important que la connaissance technique des produits concurrents. Seulement, l’activité d’intelligence économique dans le domaine des industries de défense ne se contente pas de redoubler d’efforts pour protéger des informations sensibles ou pour en collecter. Le développement de réseaux d’influence s’accompagne parfois de réelles entreprises d’influence voire même de déstabilisations ou de prédations d’entreprises concurrentes. Le retrait « d’obstacles stratégiques » s’effectue souvent par des guerres plus ou moins feutrés ou beaucoup de coups sont permis. Il n’est en effet pas rare que de véritables campagnes de déstabilisation soit mises en place par un dénigrement massif et organisé d’une décision ou du groupe de personne ayant prise cette décision.
La vente d’avions de chasse Rafale en Inde a été abordée par la presse française comme un succès bien qu’elle ait causé un véritable scandale en Inde. Ce dernier ne concernait pas directement l’offre technique de Dassault aviation mais plutôt les modalités du transfert de technologie entre la France et l’Inde. En lieu et place de favoriser HAL (Hindustan Aeronautics Limited), la grande entreprise nationale considérée favorite, Dassault Aviation a préféré tisser des liens avec Reliance en raison de pressions qu’elle « aurait reçues » par le gouvernement Modi. Anil Ambani, dirigeant de Reliance, est un ami proche du président indien ce qui soulève des craintes de conflits d’intérêts et a suscité une véritable remise en question de l’achat d’avions français par une grande partie de la presse locale.
La vente de matériel militaire peut motiver des manœuvres politiques (corruption, intercession, etc.) et le contraire est vrai également : une entreprise peut se faire contraindre puis attaquer en raison des liens politique qu’elle a tissés comme ce fût le cas pour Dassault Aviation en Inde alors que ceux-ci sont parfaitement licites. Il y a souvent d’habiles manipulateurs, au travers de cabinets d’intelligence économique (ou de services secrets), en charge de mener des investigations à charge et d’organiser des actions de déstabilisation.
De manière générale, les gros contrats d’armement sont souvent négociés avec le concours plus ou moins direct des Etats non pas uniquement du fait qu’il s’agisse d’une industrie souveraine, mais bien parce que ces contrats s’accompagnent le plus souvent d’un soutien politique et d’investissements de montants équivalents dans le pays acheteur par le pays vendeur. Les mauvaises langues argumenteront que ce point est souvent à l’avantage des américains qui parviennent à vendre des avions de combat à des pays (Belgique, Suisse, etc.) alors que les militaires de ces pays plébiscitaient d’autres fournisseurs plus proches… Il est donc primordial qu’une entreprise de l’industrie de l’armement sache élargir son offre technique pour y inclure ces autres avantages. Dans la mesure ou le produit n’est plus qu’une des nombreuses variables de l’équation, l’influence sur la partie acheteuse et la capacité à surpasser ses concurrents en termes d’offre ou d’image sont capitales. Ces derniers point sont évidemment des raisons du succès des entreprises d’intelligence économique qui viennent au soutien de ces industries à la fois opaques et où tous les coups sont permis. Pour une industrie d’armement, ne pas être doté d’un soutien par un cabinet d’intelligence économique en investigation mais aussi en influence revient à partir dans une compétition avec un handicap évident par rapport aux concurrents.