Bolivie, entre instabilité politique et guérillas



Publié par Lauria Zenou le 23 Avril 2021

En 2019, Evo Morales a été démis de ses fonctions par le Congrès bolivien et Jeanine Áñez Chávez a pris la Présidence du pays par intérim. En dépit des suspicions à l’endroit d’une possible intervention étrangère, cela illustre une nouvelle fois les relations compliquées entre ce pays et les puissances étrangères qui interviennent parfois pour défendre leurs intérêts ou leur cause. Dans l’essai Guérillas en Amérique latine (1959-1989), Thomas Péan évoque comment le régime cubain supervise une intervention en Bolivie à travers le révolutionnaire Ernesto « Che » Guevara en 1966-1967. Dans le cadre de l’affrontement continental entre Révolution et Contre-Insurrection, la Bolivie devient une zone de lutte entre ces deux camps.



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La Révolution nationale de 1952 rompt avec la logique des régimes autoritaires qui jalonnent l’histoire de la Bolivie. Ce processus politique contribue à l’association singulière entre Révolution et Nation pour un projet national et social en faveur de la Bolivie. De fait, le nouveau gouvernement supervise un ensemble de réformes sociales et économiques dans le pays notamment la réforme agraire. Dans les années 1960, les héritiers du mouvement de 1952 poursuivent l’action de leurs prédécesseurs. Pourtant, la Bolivie n’échappe pas à l’affrontement entre la Révolution et ses adversaires. Ainsi, en 1966-1967, une guérilla guévariste s’établit dans le sud du pays avec le projet d’associer les milieux radicaux locaux en faveur d’une insurrection générale.


Cette organisation révolutionnaire se distingue par le rôle des milieux castristes cubains et des réseaux révolutionnaires internationaux. En effet, le maquis guévariste en Bolivie est le produit de l’action révolutionnaire extérieure du régime cubain et de l’interventionnisme d’Ernesto Che Guevara. Celui-ci mène ainsi une lutte armée dans le sud du pays avec la présence de révolutionnaires français et latino-américains. L’échec final de cette lutte armée castriste-guévariste est d’ailleurs lié à l’absence de soutien de la part des milieux syndicaux locaux. La mort d’Ernesto Guevara de la Serna en octobre 1967 conditionne la fin de la guérilla dans la région. Les membres restants de cette organisation tentent néanmoins de mener une nouvelle lutte armée vers 1970 à travers la guérilla de Teoponte.

Par la description de la guérilla guévariste (1966-1967) par l’essai Guérillas en Amérique latine (1959-1989), on découvre ainsi la particularité de la situation bolivienne. La Révolution de 1952 représente un fait politique particulier empruntant à la Révolution et au nationalisme cherchant à développer le pays et à le doter d’une souveraineté véritable. À la différence des guérillas colombiennes, mexicaines, guatémaltèques, brésiliennes ou argentines, le mouvement guévariste constitue une intervention étrangère sur le sol bolivien ce qui suscite la méfiance de la population y compris des milieux contestataires. D’ailleurs, cette guérilla se caractérise par la mobilisation des révolutionnaires étrangers qui tentent ensuite de poursuite la lutte armée dans le pays.

En 1967 comme en 2019, la Bolivie est donc l’objet des convoitises étrangères des puissances qui tentent de développer leurs intérêts dans le pays. L’intérêt du livre de Thomas Péan se trouve dans la description du contexte bolivien dans lequel s’inscrit la lutte armée guévariste de 1966-1967. Son échec révèle les limites de l’interventionnisme guévariste et les propres caractéristiques de la situation nationale bolivienne. En réalité, plusieurs régimes militaires en Amérique latine tentent d’associer Révolution et Nation afin de parvenir à développer le pays : Bolivie, Équateur, Panama, Pérou. Ces gouvernements demeurent singuliers au sein de l’éventail des pratiques politiques latino-américaines.

L’arrivée au pouvoir d’Evo Morales dans les années 2000 illustre le triomphe des nouvelles gauches en Amérique Latine à cette époque : Brésil, Équateur, Chili, Argentine, Venezuela, Pérou, etc. Le moralisme se caractérise alors par sa tonalité altermondialiste, indigéniste et populiste visant à reconnaître l’importance des communautés indiennes dans la nation bolivienne.

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